Nom et Prénom : Thadeus est le cousin de la Main du roi, le fils aîné de la branche adjacente des Stormrage. Un sang noble pulse dans ses veines comme le courant de la Rougeoyante maquille les rives crevassées de Terremer. Et pourtant... Il ne s'est jamais senti appartenir à cette famille orgueilleuse et vénale, qui s'acharne à pourfendre chacune de ses valeurs archaïques. Trop féal pour alimenter les fourbes dessins de son cousin et bien trop pondéré pour exciter les élans démesurés de son cadet, il ne lui restait que le rôle de spectateur. Seigneur mi guerrier mi philosophe, il se conforte inéluctablement dans cette position bâtarde. Honteusement satisfait de cette fonction de figurant qui ménage sa conscience tout en lui octroyant sa chaire dans l'antichambre de la haute noblesse, il régule un temps les tensions familiales, à mille lieues de se douter qu'il sera bientôt l'acteur principal de son propre récit. Car déjà la honte et le deuil le frappent de plein fouet, bombardant son indestructible tour d'ivoire qui s'écroule avec fracas. Mais plutôt que la mort, Thadeus choisit la renaissance et l'errance perpétuelle de l'âme endeuillée de remords. Il renie le nom pourri des Stormrage pour n'être plus qu'un homme parmi les hommes. Âge : Cela fait cinquante hivers qu'il use le même corps. La mélancolie succède à l'inaltérable obstination qui exulte dans son regard d'acier. Pourtant l'aigle ne faillit pas, tel un roc érodé par le chaos du monde, un guerrier né pour se vaincre lui même. La mort ne l'effraie pas. Pas plus que la vieillesse qui ronge peu à peu son visage strié de rides. Non, il faudrait bien plus que l'immuable cours des choses pour altérer son intransigeante sévérité. Contrée de naissance : Terremer. La dure, la grande, l'indivisible. Il se souvient des côtes escarpées, des éclairs monochromes, des trainées de brouillard dans lesquelles se dessinent des silhouettes alanguies. Cette contrée sauvage et inhospitalière qui séduit plus surement qu'une femme, il ne l'oubliera jamais, quelle que soit la distance qui le sépare de ses frontières. Terremer... S'agrippant à chaque lambeau de souvenir comme un chien s'accroche à son os, il gardera toujours en mémoire la décrue vermeil de son fleuve capricieux, la beauté sculpturale d'un rapace qui fond sur sa proie. Allégeance : Il fut un temps où il aurait donné sa vie pour défendre la couronne. Pourtant les valeurs qu'il sanctifiait jadis ne sont plus que de vagues illusions dénuées de la moindre substance. Aujourd'hui ce sont ses frères d'armes qui comptent à ses yeux. Cette horde glapissante de hors la loi qui marche à ses côtés - ultime instigatrice de ses rares sourires encensés par l'alcool. Il s'accroche à ces néophytes, tentant vainement de trouver le salut dans ses nouvelles responsabilités. Non pas pour absoudre ses pêchés qu'il endure avec une souffrance en règle, mais bel et bien pour s'ancrer quelques minutes encore dans la réalité. Statut du sang : Thadeus est d'extraction noble. Si cela a un jour eu de l'importance, ce n'est plus qu'anecdotique. Son engagement dans la garde des ombres l'a profondément transfiguré. Il s'est lui même extrait de la déca-danse des membres de la cour, du bal démasqué des illusions, de ces rongeurs grignotant chaque miette de pouvoir jusqu'à l'indigestion. Pourtant certaines marques semblent tatouées dans ses gènes. Le goût d'écrire, l'oeil conquérant, la démarche assurée... Autant de  réminiscences de sa vie antérieure.  Race : Hommes. Statut civil : Thadeus est veuf. Encore aujourd'hui le souvenir de sa femme ravive des cauchemars béants dans le magma de ses nuits. Urianne... Un mot peut il contenir à lui seul autant de remords, de désirs inassouvis, de pulsions charnelles et destructrices ? Le cycle infernal n'en finit plus. Et s'il lui prend de se croire libéré, ce n'est que pour souffrir davantage quand se fait de nouveau sentir le besoin d'elle, cette absolue nécessité de se remémorer les courbes de son corps exsangue entre ses bras. Orientation sexuelle : La chose est proscrite au sein de la garde des ombres. Thadeus a fait serment d'abstinence, renonçant sur parole aux plaisirs prosaïques dont les hommes se sustentent tout au long de leur vie. Sans doute est ce d'ailleurs sa plus impitoyable condamnation, la seule issue pour absoudre ses péchés dans le deuil éternel de son épouse. (Dans l'art de se flageller, le maître d'armes excelle!) Métier ou fonction : Seigneur chevalier et maître d'armes. Faction ou Guilde : Garde des ombres. Rang : Maître d'armes. Armes possédées : Rares sont les détenteurs d'une épée forgée dans les sous terrains de Forgenerg. Thadeus est de ceux là. Lourde et vorace, Givre ne lui fait jamais défaut. Elle est le prolongement de son bras, l'arme fatale greffée dans la main calleuse du guerrier. Bien que la poignée soit robuste et recouverte d'épaisses lamelles de cuir, le pommeau sculpté de motifs zoomorphiques révèle une certaine subtilité dans l'art de faire la guerre. Un aigle écarlate se dessine sur la garde cuivrée, symbole suprême de la noblesse de Terremer. Mais ce qui fait réellement l'apanage de cet estoc, c'est cette lueur bleutée qui se reflète sur le tranchant de sa lame lorsqu'on l'expose aux caresses phosphorescentes d'un halo de lune.

ɤ Que pensez vous de la mort du roi ? L’héritier étant encore jeune, arrivera-t-il à gérer le royaume selon vous ? Peu renseigné sur les faits et gestes de la cour, Thadeus se contente de faire ce pour quoi on le nourrit, l'habille et l'héberge, à savoir défendre la prison troglodyte de Forgenerg. Mais ce détachement face au jeu d'échecs nobiliaire n'atténue en rien sa lucidité. Il ne peut douter de la ténacité de son cousin qui règne déjà comme un lion dans l'ombre décroissante, ni de l'aveugle naïveté d'un puceau couronné sur une tombe. Le jeu supplante souvent les enjeux. Telle est la conviction du maître d'armes qui préfère se focaliser sur la véritable menace, celle qui se profile insidieusement sans qu'on ne lui oppose aucune résistance. Car il se fiche pas mal de savoir quel opportuniste corrompu détrônera le gosse si ledit malfrat lui envoie des renforts ! Des hommes de préférence, plutôt que des garçons incapables de tenir une épée sans fléchir sous son poids. Pourtant s'il creuse un peu dans la fosse commune de ses espérances, il en vient à souhaiter le salut du prince. Infime sursaut de cette vieille amitié qui le liait jadis au père de l'enfant, lorsqu'il n'était, lui aussi, qu'un pion dans cette interminable succession de jeux de dupes. ɤ  A votre avis la garde des ombres a-t-elle encore lieu d'être ? Les Engeances ont-elles vraiment disparu ou la menace est-elle encore présente ? Thadeus sait. Thadeus sent. Thadeus voit. Damnés soient les fous qui minimisent la menace des engeances tapies dans l'ombre de Forgenerg ! Loin d'être endormi le mal veille sans relâche, à l'affut du plus infime interstice par lequel s'infiltrer. Les enfants de Ferghan attendent patiemment l'avènement de leur messie, puisant dans leurs cauchemars les plus fuligineux la force d'acérer chaque jour davantage le tranchant de leur rancune contre les hommes. Il n' y a aucune place pour le doute, la faiblesse ou la procrastination. C'est aujourd'hui que tout se joue, dans le caveau de la première guerre, alors même que le monde commence à oublier. ɤ Les mages ont été bannis sur une île près des côtes d'Alcahar, étant désignés coupables de tout le mal qui s'abattait sur le continent. A vos yeux était-ce juste ? La magie est elle une chose à proscrire ? Le maître d'armes se méfie de la magie comme de la peste. Sans doute a t-il côtoyé les engeances trop longtemps pour n'être que sceptique. A ses yeux toute forme de sorcellerie (parce que c'est bien de cela dont il s'agit, d'un art aussi contre nature que nébuleux) doit être exterminée de toute urgence. Oui, Thadeus méprise les mages qui s'élèvent au dessus d'une logique universelle pour façonner le monde à leur image (noire, néfaste, empoisonnée d'orgueil). Sa croisade est sans pitié pour ces hommes-démons, ces dégénérescences venimeuses qui répandent leur poison comme du miel. Au diable les bons sentiments ! Il n'y a pas de place sur terre pour ces créateurs d'engeances, ces boîtes de Pandore vivantes, ces manipulateurs chroniques qui succombent à leur propre pouvoir. ɤ  La forêt de sombrebois regorge de créatures plus infâmes les unes que les autres, vous sentez-vous en sécurité malgré le fait qu'il se passe des choses étranges non loin de là ? Le gouvernement devrait-il se préoccuper de ce qu'il s'y passe ? Les terres de Sermar sont trop éloignées de Forgenerg pour que Thadeus se préoccupe des ombres qui les peuplent. Sa lutte acharnée contre les engeances focalise toute son attention. Car Sombrebois n'est qu'une illustration de l'insécurité croissante qui gangrène le royaume. Et si la couronne s'obstine à rester sourde aux cris d'alarmes de ses chevaliers, combien de temps résisteront encore les terres libres de Kahanor déjà rongées par la valse macabre des créatures les plus viles ? Thadeus n'ose imaginer ce qu'il adviendrait si le jeune roi persistait dans son aveuglement. Il connait d'expérience la fourberie du mal qui se fait passer pour mort. Car ne vous laissez pas tromper ! Terré comme un cadavre dans les entrailles de la terre ou la pénombre d'un feuillage opaque, l'ennemi n'a jamais été aussi vivace. Alimenté par la rage inhérente aux semences démoniaques, il scrute le moindre de vos faits et gestes, prêt à bondir comme un fauve pour vous ravir jusqu'au dernier sursaut d'espoir. ɤ Quelles ont été vos motivations à rejoindre votre faction/guilde plutôt qu'une autre ? Où va t-on lorsqu'on a tout perdu ? La garde des ombres est le premier refuge de l'homme qui s'auto-détruit, le titanesque exutoire des angoisses et des péchés. Après le meurtre de sa femme en Terremer, Thadeus a longtemps hésité entre l'honneur et l'expiation, le suicide et l'interminable combat d'un seigneur déshonoré. Le regret transpirait par toutes les pores de sa peau, suintant jusque dans son coeur pour y noyer des sentiments naufragés. La colère, l'amour, l'espérance d'une salvation divine... Tous ces noeuds gordiens qu'on lessive dans une averse de remords pour ne pas devenir fou ! Trop lâche pour s'en remettre à la disgrâce d'une trinité divine, le seigneur déchu prit le noir, croyant par cet acte solennel fuir les démons qui s'acharnait à prendre possession de son âme. Si ce geste le sauva d'une inéluctable déchéance, il marqua également l'avènement d'un homme neuf, taillé dans la violence et les désillusions qui sanctifient ce monde.

Thadeus dominait la procession des vainqueurs, son épée ceintrée contre sa cuisse encore tâchée du sang et des larmes des vaincus. A ses côtés se dressait le capitaine des armes de Kahanor, un homme de haute stature que la légende se chargerait d'immortaliser. Thadeus ne pouvait détourner son regard de cette montagne de bravoure qui daignait marcher à ses côtés comme un égal.  Cette vision quasi divine occultait le défilé des morts et des blessés, le souvenir cuisant des viols et des massacres qui l'avaient échauffé malgré lui. Il n'était qu'un jeune homme lâché sans boussole dans le carnage assourdissant, une lame de plus dans la valse dramatique des lances et des épées. Et voilà que cet homme qu'il admirait entre tous affichait publiquement ses mérites ! C'était grisant comme les prémices d'un paradis artificiel, le chant d'une femme qu'on possède après des mois d'abstinence. Dans les rues la plèbe acclamait le retour des combattants, agitant l'oriflamme royal jusque dans les bas fonds d'Aubétoile. Mais le jeune homme restait sourd à la canonisation générale, protégeant son orgueil masculin exalté par les combats d'une armure inflexible de droiture et d'humilité. Seule comptait la considération de son modèle déifié, l'inégalable reconnaissance de celui qui sait. Dans la ferveur omniprésente, une ombre traversa subrepticement le visage basané de Thadeus. C'était comme une absolution !
Assis à la table du souverain, Thadeus gardait le silence. Son tempérament taiseux ajoutait à l'intransigeante prestance dont il faisait montre en toute occasion. Le banquait lui semblait interminable, chacun y allant de son éloge pour flatter son voisin tout en célébrant l'indicible dévouement des chevaliers. A présent qu'il s'était fait remarqué par ses faits d'armes, il n'était plus question d'ignorer l'invitation personnelle du roi. S'il appréciait l'honneur qui lui était fait, il ne s'était jamais senti en adéquation avec les rouages de la cour. Bien sûr il était conscient des affaires politiques qui agitaient le royaume, mais ce bal dé-masqué l'avait toujours laissé de marbre. C'était en partie pour cette raison qu'il s'était enrôlé dans l'armée, préférant ses prérogatives militaires aux statuts d'intrigant-courtisan. Cette charge vulgaire était l'apanage de son frère et de son cousin qui en goûtaient chaque saveur avec la même délectation. Lui même ne se sentait vivant que sur un champ de bataille ou dans les confins paisibles et sauvages de Terremer. C'était son côté paradoxal, le voile obscur du solitaire réfléchi. Mais  parce que chaque homme a besoin d'un exutoire, il avait choisi la plus noble des maîtresses : la chevalerie. La guerre s'était présentée comme une porte de salut, une déesse salvatrice qui l'avait mis à nu. Il avait appris à force de tentations qu'il est plus facile de combattre l'adversaire que ses propres pulsions destructrices. Loin d'altérer sa ferveur dogmatique, cette épreuve l'avait renforcé au delà de l'imaginable, achevant de graver les serments chevaleresques sur le parchemin de son âme. "Me feriez vous le plaisir de vous prêter un instant à l'art de la conversation ?" Des yeux bleus comme des saphirs l'extirpèrent de sa torpeur. La jeune femme le fixait sans ciller, un sourire taquin maquillant ses lèvres écarlates. Si Thadeus se départissait rarement du masque implacable qui le caractérisait, il ne manqua pas de balbutier devant la beauté féline qui lui faisait face. Son teint de porcelaine était rehaussé par la teinte ambrée de sa robe qui épousait merveilleusement ses formes sans pour autant sombrer dans l'ostentatoire. Le jeune Stormrage s'étonna de n'avoir remarqué plus tôt la finesse de ses traits. Il s'empressa de répondre avec une solennité qui la fit sourire. « Pardonnez mon manque de galanterie madame. Soyez assurée que rien ne me ferait davantage plaisir que de vous être agréable. » Il n'était guère habitué aux conversations de cour, parlant plus volontiers le langage des soldats que des précieuses qui peuplaient les banquets. Il fit néanmoins de son mieux pour satisfaire la curiosité muette de la demoiselle. «Thadeus Stormrage, de Terremer. Je n'ai pas encore eu l'honneur de vous être présenté. » La jeune femme lui répondit en riant sous cape, jaugeant l'épée qu'il portait toujours à sa ceinture (du moins le supposa t-il en suivant son regard.) « Urianne de Tarth. » Venait il d'être frappé par la foudre ? Un désir aussi pur que décadent prit soudainement possession de son corps, reléguant toute autre considération en arrière plan. Sa verge gonflée de sang contre ses cuisses, il admira silencieusement l'objet de ses pensées déliées. Oui, il possèderait cette femme à n'importe quel prix ! Et qu'importe le regard désapprobateur d'Hermeus qui le fixait à l'autre bout de la table... Il ferait d'elle une femme honorable quel que soit le montant de sa dot.

Les chevaux battaient le sable humide de la dernière marée. Sous les tentures topaze de la calèche seigneuriale, Thadeus scrutait le paysage comme un aigle emprisonné. Le vent qui soufflait sur la côte avait contraint l'attelage à  s'écarter de la route principale pour longer le couvert des falaises. Le seigneur héla son cocher pour lui sommer d'accélérer le pas, ordre bref et succinct qui témoignait davantage d'une aptitude à commander des soldats que des valets. Il ne contenait son impatience qu'au prix d'un effort surhumain, serrant fermement le pommeau de son épée pour ne pas céder un pouce de sa posture fière et altière. Seule la promesse qu'il avait faite à sa femme l'empêchait de bondir hors du carrosse pour mettre le pied à l'étrier. Une main douce et apaisante vint se loger à la jointure de son sexe et de sa cuisse. Aussitôt son regard noir vrilla sur les courbes familières mais non moins tentatrices de sa légitime. Urianne le comprenait mieux que lui même. Elle était de la race des femmes d'envergures, des chefs officieux, des  rares épouses capables d'endosser la subtile étoffe d'une amante. « Cesserez vous de vous tourmenter ? Vous finirez par attirer le mauvais oeil sur les futurs mariés. » C'était dit sur le ton de la plaisanterie, comme une réprimande voilée de sollicitude. Thadeus esquissa l'ombre d'un sourire. Une fois de plus, la voix de la sagesse avait parlée. Il se redressa contre le siège nappé de velours pourpre, pressant la main de sa précieuse entre ses doigts sertis d'autant de bagues que de cicatrices. (Curieux paradoxe propre au noble guerrier.)  « Par pitié, ne jouez pas les oiseaux de mauvaise augure.» Un éclat de rire cristallin lui répondit en écho. « D'autant qu'une telle union ne peut que détourner votre frère de ses ambitions malheureuses. » Thadeus approuva d'un hochement de tête avant de se renfermer sur lui même, trouvant refuge dans la tour d'ivoire mentale qui le préservait des réalités de ce monde. Il aurait tout donné pour qu'Hermeus comprenne enfin le sens des mots loyauté, droiture et dignité. Ce qui n'était à l'origine qu'une belle espérance s'était mû en véritable obsession suivant que l'indomptable étalon grandissait et qu'il  devenait de plus en plus difficile de prétexter la démesure inhérente à l'adolescence. Les deux frères s'étaient progressivement éloignés, le tempérament solitaire de Thadeus n'invitant guère aux épanchements fraternels. Comme toutes les familles, la lignée Stormrage comprenait son lot de malédictions génétiques et de liens de sang trahis pour quelques considérations prosaïques. La philosophie avait depuis longtemps convaincu Thadeus de l'ambiguïté du sanctuaire familial, qui était à la fois  havre de sécurité et lieu de l'extrême violence. Mais désormais la donne était différente. Hermeus épousait une Hammer et cette union prestigieuse ne manquerait pas d'étouffer les restes de son insatiable ambition. Car dès lors que les mains des époux seraient jointes, il ne pourrait faire autrement que de se prosterner aux pieds du roi. Si l'honneur le commandait, sa belle famille saurait bien l'y contraindre. Thadeus fixa ses yeux perçants sur le tranchant des vagues, caressant l'inflexibilité de ses positions. Il ne pouvait souffrir ni l'échec, ni le laxisme qui gangrénait la plupart de ses pairs. Quant à ce qui était du reste -tout le reste- il lui aurait fallu plusieurs vies pour en désherber les racines.
Des hommes couraient dans la grande cour, dégainant leurs épées tout en poursuivant des coupables imaginaires. Le vin avait eu raison de leur lucidité et peu d'entre eux étaient encore à même de prouver leur opportuniste loyauté envers la couronne. La garde s'était déjà lancée à la poursuite du fuyard depuis des heures, mais qu'importe ! Les dames se pressaient dans le couloir, leurs mouchoirs blancs s'agitant contre leurs lèvres pour les préserver de l'odeur de la mort. Le bruit se répandait comme une trainée de poudre dans la capitale. Hermeus Stormrage avait assassiné sa jeune épouse durant sa nuit de noces ! Fière comme une statue de marbre, Urianne agrippait le bras de son mari pour ne pas laisser transparaitre la honte qui l'enveloppait désormais comme un cocon. On avait retrouvé ladite Hammer gisant dans un bain de sang, encore alanguie dans la sueur de son amant. Face à cette réalité crue, Thadeus demeurait impassible, essuyant les regards méprisants des courtisans d'un regard fier. Si la culpabilité de son frère n'était pas encore prouvée, sa fuite l'accusait tout autant que son geste. Un geste des plus misérables qui lui vaudrait le déshonneur éternel. Le chevalier se redressa de toute sa hauteur tandis que son cousin passait devant lui comme une ombre, ignorant jusqu'à la chair de sa chair et le sang de son sang. Thadeus braqua son regard d'ébène sur l'assemblée solennelle qui le dévisageait en silence, refusant de céder sous le poids des accusations muettes. Il resta de marbre, telle une statue taillée dans le roc, avant de fendre lentement la ronde des hypocrites pour venir plier genou devant son roi. Lorsqu'il osa enfin croiser le regard d'Halbarad, ce ne fut pas la disgrâce du souverain qu'il distingua dans ses pupilles délavées par quinze années de règne, mais la pitié d'un ami qui s'éloigne à contre-coeur. Cette vision l'atteignit jusque dans ses entrailles, lui remuant les tripes plus surement qu'un coup d'estoc.  C'était un double déshonneur, une honte qu'il ne pourrait jamais laver. Sans dire un mot, Thadeus guida son épouse vers le pont levis, songeant avec amertume à la retraite déshonorante qu'il lui offrait en gage de son respect. C'était une condamnation à vie, la fin du règne de la lumière et l'avènement de l'obscurité. Jamais plus il ne reverrai ce frère qu'il aimait à sa façon. Le monde continuerait sans eux, privé de la beauté  d'Urianne qui s'était figée comme un bloc de glace. Elle n'était plus que la femme du frère d'un assassin.

Cette voix qui se répercutait sur chaque pierre du château, il ne la connaissait pas. C'était la voix d'une autre femme dans un autre temps, une réalité différente, un univers cloisonné. Seul subsistait cet accent du nord qui ondulait suivant les vibrations d'une hystérie crescendo. L'aliénée vibrait dans la plus haute tour du château, emprisonnée comme une furie dans sa propre psychose. Son coeur s'était asséché d'avoir trop pleuré. Elle se contentait de crier, d'extérioriser tous ces démons qui la dépossédaient lentement de sa raison, ces engeances de la conscience humaine qui l'étreignaient pour mieux la fouetter de leurs queues fourchues. Même lui n'était plus qu'une ombre parmi les ombres, de plus en plus abstrait sur l'écran de sa démence. Alors elle hurlait. Encore et encore jusqu'à ce qu'il n'en puisse plus. Jusqu'à ce qu'il la supplie de se taire et de revenir pour lui, inlassablement, comme une litanie funeste qu'on réciterait en boucle. Jour après jour, nuit après nuit, comme si sa propre vie n'était plus qu'une succession d'instants rythmés par le souvenir de ce qu'elle était jadis. De ce qu'elle serrait encore s'il avait su la préserver. Mais il avait failli et cette pensée lui était insupportable. Il avait assisté à son déclin tel un spectateur affable, impuissant devant le ras de marée qui avait déferlé sur leur vie comme une langue démente et vorace. Tout avait été saccagé, jusqu'à sa beauté langoureuse qui gisait en lambeaux sur son visage creusé par la fatigue et le désespoir. Thadeus se laissa choir à ses pieds, contemplant la dépouille de son bonheur à l'agonie. A quel moment avait elle cessé de crier ? Depuis combien de temps ses paumes lacérées par les ongles de la folle serraient ils sa gorge déployée, délibérément offerte à la mort salvatrice ? Etait ce bien réel ? Mille fois il avait rêvé de cet instant et mille fois il s'était flagellé pour l'onirique péché qui contrastait ses nuits. Pour avoir osé trahir l'amour inconditionnel qu'il lui vouait encore envers et contre tout. La solitude l'assaillait comme un ennemi perfide et immatériel, un spectre invisible qu'il ne pouvait transpercer de sa lame. Seul. Seul comme un rat. Où était cet enfant qu'ils n'avaient jamais eu, cet espoir avorté que tout l'amour du monde n'avait pu créer ? Où était ce frère qui l'avait abandonné sur le front pour qu'il endure à sa place le mépris de la vox populi ? Et ce père qui ne l'avait jamais porté dans ses bras sinon le jour de sa naissance ? Son roi, ses frères d'armes, ses serviteurs qui désertaient les uns après les autres... Où étaient ils tous ?  « En enfer ! Qu'ils brûlent tous en enfer ! » La douleur l'empêchait de raisonner, irradiant jusque dans sa poitrine submergée de sentiments aussi contradictoires qu'abjects. Le soulagement, la rage, l'amour, le manque, le déshonneur... Tout se mélangeait dans un kaléidoscope de pulsions suicidaires. Les couleurs se mêlaient pour n'en former plus qu'une : le noir. Il prendrait le noir.

Abandonnant le cadavre exsangue de sa femme, Thadeus Stormrage quitta le bastion de Terremer sans prendre le temps de se retourner. Il n'aurait pas assez de toute une vie pour racheter ses fautes.


« Quand cesseras tu de gémir comme une pucelle ? C'est la mort qui t'attend, l'indéfectible ennemie ! Regarde là bien en face -comme un homme- et peut être qu'elle t'accordera le sursis que tu ne mérites pas. » Le maître d'armes appuya davantage contre la nuque de sa nouvelle recrue, enfonçant profondément son crâne dans la terre bourbeuse qui maculait le sol. Cela faisait des années qu'il s'était blindé comme un roc, n'éprouvant plus de pitié pour quiconque. C'était un sentiment niais que cette pitié qu'on traînait comme un boulet sur la pente rocailleuse de l'existence. Ca ramollissait les nerfs plus surement qu'une vierge, précipitant la chute inévitable pour orchestrer le coup fatal. Non, il n'y avait pas de place pour les faibles à Forgenerg. Dès lors qu'on prenait le noir, le cauchemar devenait réalité. Il fallait s'y faire ou mourir ! Sans plus de considération pour la racaille crasseuse qui gisait à ses pieds comme une poupée de chiffon, Thadeus dégaina son arme pour fendre l'air en guise d'exemple. « Votre lame est votre plus fidèle alliée. Ne vous en séparez jamais, pas même pour aller pisser. Et maintenant en piste ! C'est pas avec vos têtes d'ahuris que vous protégerez quoi que ce soit. » L'ombre d'un sourire carnassier lacéra ses lèvres gercées. Sa barbe noire accentuait la stricte autorité de son regard d'acier, et nul n'osa moufter tandis qu'il s'éloignait dans la pénombre décroissante.

Dans le fond, il préférait ne pas s'attacher. Peu de ces hommes-enfants survivraient à leur première année dans le tombereau géant de Forgenerg. La plupart seraient tués sur le front, d'autres encore se suicideraient ou tenteraient de déserter. Pour lui qui avait déjà tout perdu, c'était plus facile à supporter. Au regard de ses propres démons, les cauchemars qui découlaient du sang d'engeance lui offraient presque du répit. Il jeta un coup d'oeil à la danse malhabile de ses bizuts. Ils manquaient tout autant d'entrainement que de plomb dans la tête. Leurs parades étaient gauches et hésitantes, si tant est qu'ils savaient tenir une épée. Pourtant il n'hésiterai pas à les envoyer au devant du massacre. Depuis qu'il avait quitté Terremer, il ne s'encombrait plus de sentiments inutiles. Après avoir touché le fond, d'aucun aurait pu croire qu'il serait remonté vers la surface, mais non. Il continuait de flotter entre deux eaux, dans cet enfer clair obscur qui l'avait sauvé de la mort. Malgré son allure sévère et intransigeante, il savait qu'il donnerait sa vie pour défendre chacun de ces rampants qui lui offraient une raison de vivre. Chacune de ces vies détruites était une nouvelle flamme dans les ténèbres de son existence, un ultime espoir d'emporter la bataille inéluctable qui se profilait à l'horizon. Alors vaille que vaille, il se levait chaque matin pour tenter l'impossible.

ɤ Pseudo/âge/sexe (f ou m) ; LOUVE ☽. ɤ Fréquence de connexion ; Régulière mais pas permanente en raison de quelques soucis de santé. Approximativement 5/7 ɤ Que pensez-vous du forum? ; Les annexes sont de petits bijoux, c'est un régal ! ɤ Comment l'avez-vous découvert ? Je suivais le projet sur Bazzart fut un temps.  ɤ Code du règlement ; Validation par Ava ! ɤ Célébrité choisie ; Liam Cunningham. ɤ Credits (avatar, icon etc.) ; Avatar de MORIARTY & Bannière de JE-SAIS-PAS-QUI sur TUMBLR (LIEN).

Bravo l'ami ! T'as passé l'épreuve de la fiche de présentation avec succès et t'es désormais validé ! Pour la peine, tu te retrouves dans le groupe des THE JUSTICE.

Un excellent scénar accompagné d'une plume plus qu'agréable à lire, bref, ta fiche était top, nous te validons donc sans hésiter ! Bon jeu.

Par contre, t'en as pas terminé avec les trucs chiants ! Tout d'abord, il va falloir que tu postes ta fiche de liens. Rassure-toi, il y a un modèle à respecter, ça t'évitera d'avoir à coder pendant trois heures. Ensuite, tu peux ouvrir ta fiche de RPs. C'est le lieu idéal pour que les autres membres puissent savoir où tu en es & savoir si oui ou non tu es libre pour un petit RP. Pour nous aider à mettre à jour rapidement les annexes, n'oublie pas de remplir ce formulaire ici !

Encore avec nous ? Parfait ! Si tu es artisan ou tenancier d'une boutique, c'est ici. Ton personnage n'a pas encore de toit sur la tête ? C'est ici qu'il faut aller demander. Maintenant, ton personnage est bien installé ! Aaahn dernière petite chose. Si tu as envie de créer un scénario, c'est ce modèle qu'il faut suivre. Encore de l'inspiration ? N'hésite pas à lier ton personnage à des PVs déjà écrits. C'est par là que ça se passe !

Néanmoins, nous savons tous qu'un forum n'est pas là que pour le RP. C'est pour ça que tu te conseillons d'aller faire un tour dans les différents sujets comme les petits jeux. Tu veux donner ton avis ou raconter ta vie ? N'hésite pas à écrire tes amours/emmerdes dans le sujet flood intempestif.

N'oublie pas une chose ; amuse toi bien !