nom et prénom : Selkis, le nom de sa famille, son seul souvenir de ses parents et de son lien avec eux et sa petite sœur. Jehan, un prénom des plus simples. Dorénavant, il se fait seulement appelé par son prénom, de peur que quelqu’un se souvienne du massacre des Selkis, et l’empêche de finir ce qu’il a prévu de faire. âge : vingt-deux ans. contrée de naissance : Tameriel, dans une petite ferme au milieu de nulle part. allégeance : il se fiche des seigneurs, de ceux qui règnent sur Kahanor, il ne s’intéresse qu’à lui-même et au but ultime de son existence, il n’a pas le temps pour la politique et les allégeances. statut du sang : il est fils de fermiers, pas une seule goutte de sang noble ne circule dans ses veines. race : il est humain, avec ses forces et ses faiblesses, même si certains en doutent et le considèrent plutôt comme un monstre. statut civil : on pourrait considérer qu’il est veuf, même si sa situation est … particulière. Il est célibataire depuis. orientation sexuelle : fille, garçon, quelle est vraiment la différence ? Les deux perdent du sang quand on les entaille. Ceci dit, il n’a jamais goûté à la peau masculine. métier ou fonction : il est tueur à gages, à son propre compte, pour pouvoir se permettre une grande liberté de mouvement ainsi qu’une large clientèle. armes possédées : il possède plusieurs armes, y compris un arc et des flèches, mais sa favorite reste un petit poignard, qu’il peut aisément cacher.

ɤ que pensez vous de la mort du roi ? l’héritier étant encore jeune, arrivera-t-il à gérer le royaume selon vous ? non pas que je m’y intéresse, mais un roi aussi jeune est une proie facile, une victime malléable comme de la boue et qui peut aisément être manipulée. Son père est décédé bien rapidement, à sa place je me ferais du souci. Le royaume était déjà en proie à des divisions çà et là, ce changement sur le trône ne fait que les accroître. Si cela continue, je crois que je vais avoir plus de travail, donc plus d’argent, finalement, une petite guerre dans ce royaume me servirait bien. ɤ  a votre avis la garde des ombres a-t-elle encore lieu d'être ? les engeances ont-elles vraiment disparu ou la menace est-elle encore présente ? on ne sait jamais. De telles créatures peuvent aisément renaître de leurs cendres subitement et si la garde des ombres n’existent pas alors, les détruire ne serait pas chose facile. Je comprends l’utilité de cette institution. C’est lorsque l’on croit qu’un monstre n’est plus, qu’il réapparait par surprise. Au grand dam de ceux qui le pensaient disparu. ɤ les mages ont été bannis sur une île près des côtes d'alcahar, étant désignés coupables de tout le mal qui s'abattait sur le continent. a vos yeux était-ce juste ? la magie est elle une chose à proscrire ? la magie est une hérésie, c’est quelque chose qui va à l’encontre de l’ordre de la nature. C’est quelque chose de répugnant. Une forme de lâcheté face à la puissance de la manipulation, de la politique et des armes. Que ces mages ne reviennent jamais ! Cela évitera à notre pays de subir de nouvelles catastrophes, et nous nous en porterons que mieux ! ɤ  la forêt de sombrebois regorge de créatures plus infâmes les unes que les autres, vous sentez-vous en sécurité malgré le fait qu'il se passe des choses étranges non loin de là ? le gouvernement devrait-il se préoccuper de ce qu'il s'y passe ? Si je me sens en sécurité sachant que des monstres règnent dans les bois et que je peux rencontrer l’un d’eux au détour d’un chemin ? Je mentirais si je répondais que oui. Non, je ne me sens pas en sécurité, c’est d’ailleurs pour cela que mon arc est toujours prêt à être saisi, mon poignard caché dans ma botte peut être attrapé à tout moment. Je sais que si je me retrouve face à un monstre, je me débattrai, pour sauver ma vie. Puisque je sais qu’elle a un but, un horizon à atteindre avant de m’éteindre, et je ne laisserai pas la moindre créature m’empêcher d’y arriver. Quant au gouvernement, je doute qu’il puisse faire quelque chose. Surtout depuis que le roi est un gosse ...

Il était né dans cette petite ferme, entre ces quatre murs où régnait une atmosphère brûlante sous un soleil sec. Sa mère suffoquait tandis que son père et l’amie qui avait assisté à l’accouchement s’occupaient de lui, le lavaient malgré les hurlements qu’il poussait de la faible force de ses poumons de nouveau né.
Durant quatre longues années, il fut l’unique enfant Selkis. Chaque tentative pour lui offrir un petit frère ou une petite sœur se concluait par une fausse couche terrible. Le sang qui s’écoulait de l’entre-jambes de sa mère, les cris et les pleurs de celle-ci, fascinaient le petit garçon qui s’approchait toujours au plus près, pour sentir l’odeur âcre et puante du corps de sa mère. Il était tout jeune, et ses yeux brillaient d’une étrange lueur que l’on ne saurait proprement qualifié. Si ce n’est de folie, mais à cet âge-là, ce n’est pas ainsi que l’on définit un petit bonhomme intrigué et curieux.
Un jour, sa petite sœur naquit. Neïade. Elle n’était pas comme les autres, ceux qui n’étaient pas parvenus à sortir en vie du ventre de mère. Elle n’était pas fragile, elle était résistante, forte, elle était spéciale.

Au fur et à mesure des années, Jehan devenait un jeune garçon, caractérisé par un visage angélique auquel on aurait donné les bons Dieux sans confession, encadré par des cheveux fins couleur des blés. Il rêvait de chasse, de traque, de flèches fichées dans le flanc des bêtes, du braillement poussé par celles-ci en tombant au sol. En attendant, il était condamné à s’occuper, prendre soin de ces mêmes bêtes, de ce bétail qu’il jugeait insignifiant. Il n’avait pas vraiment d’amis, ne parvenant pas à se lier à quelqu’un qui ne comprenait pas ses ambitions, les autres enfants ne souhaitaient que jouer, ou serrer dans leur bras les chats gras et douillets qui passaient dans les rues. Un jour, alors qu’il n’était âgé que d’une dizaine d’années, il serra dans ses bras un de ces animaux jusqu’à ce que le miaulement s’éteigne doucement. Il s’amusa ensuite à tordre le cou du chat, imaginant avec une méticulosité particulière ce que ce même geste pouvait donner sur un être humain. Ce jour-là, plusieurs enfants le virent, des traces de sang sur les mains et un sourire satisfait aux lèvres. Ils en avaient peur.
Une autre fois, il avait douze ans, Neïade en avait huit. Sous ses yeux innocents et apeurés, il avait éventré une vache. Il s’était depuis toujours demandé comment se composait l’intérieur d’une telle bête, il avait eu sa réponse. Le sang était répandu sur ses vêtements et sur la moindre parcelle de son corps qui n’était pas couverte. Il était heureux. L’odeur lui plaisait, elle semblait être un parfum particulier dans lequel il aurait aimé être baigné chaque jour. Le liquide rougeâtre lui collait sur la peau, créant par la suite des plaques rouges, il souriait en les voyant. Il sentait sur lui le regard de sa sœur, il ne parvenait pas à décrypter la lueur qui y brillait, peut-être était-ce de la crainte … Mais c’était aussi tellement proche de l’admiration !

Il avait quatorze ans. A cet âge là, il était un homme fait, il savait ce qu’il voulait, plus important encore, il savait qui il voulait. Et cette délicate créature répondait au délicieux nom d’Ygride. Il l’avait rencontré au détour d’une rue dans le village voisin, sa main s’était attardée sur l’épaule du jeune homme tout en lui susurrant des mots doux et érotiques à l’oreille. Il n’avait jamais senti une femme si près de lui depuis les baisers que mère lui déposait sur le front durant son enfance. Le sang lui était monté aux joues et avait suivi la jeune femme dans la maison de plaisir. Il ne lui avait fallu que d'une unique fois pour se sentir parfaitement bien à ses côtés, pour adopter le contour de ses formes et la chaleur de son être.
Est-ce que c'était de l’amour ou simplement la possibilité de pouvoir faire ce qu’il désirait d’elle et avec elle ? Elle était sienne, à condition qu’il mette le prix. Ce qui était quelque chose qu'il ne pouvait faire. Il tenta bien d'emprunter des sommes d'argent à ses parents, mais ils ne pouvaient pas se permettre de lui payer une prostituée quotidiennement, ni même pour un jour de plus. Quant à elle, Ygride l'aguichait à chaque fois qu'il s'approchait de la maison de plaisir, mais s'éloignait de lui dès qu'elle réalisait qu'il n'avait pas d'argent. Un jour, elle lui glissa qu'elle serait éternellement sienne s'il l'épousait. Les parents de Jehan s’y opposèrent farouchement. Il était un fils de fermiers et s’il se mariait avec une prostituée, il se mariait bien en dessous de sa condition. Et c’était une chose qu’ils ne pouvaient accepter sans broncher. Seulement, chaque jour sans Ygride voyait sa colère contre ses parents grandir, son besoin de sang croître. Cela ne pouvait finir que d’une seule façon. Il le savait.
Ce fut d’abord père qu’il transperça de son petit poignard, le sang gicla, lui éclaboussant le visage ainsi que les quatre murs qui l’entouraient. Le chien tenta de lui sauter dessus, mais ce fut facile. Bien plus facile qu’avec père qui avait tenté de se débattre tout en invoquant tous les Dieux de sa connaissance, maudissant son fils pour le faire brûler dans les feux de l’enfer. Mère était restée dans un coin, pétrifiée. N’osant pas bouger, gardant son regard fixé sur le fruit de ses entrailles. Et quel regard ! Tout l’amour et l’incompréhension qu’elle éprouvait à son égard transparaissaient. Ses prunelles laissaient échapper des larmes tandis qu’elle implorait les Dieux de sauver son enfant de sa folie. Jehan l’égorgea avec une douceur et une lenteur sans pareilles. Il vit la mort s’emparer du corps de sa mère, celle qui l’avait mis au monde et qui n’avait cessé de l’aimer malgré tout.

Sa sœur. Elle sortait du placard. Comme si elle désirait elle aussi mourir ici, auprès de ses parents. Elle était frêle, tenait à peine droite sur ses deux jambes tremblantes. Ses yeux parcouraient le carnage. Lui ne pensait qu’à Ygride. Il était à elle et elle était sienne dorénavant, rien ne les séparait. « toi Neïade, tu vas courir le plus loin possible pour ne jamais revenir. Cours ! » Il la laissait vivre. Du moins, pour le moment. Un jour, il la traquerait et l’abattrait comme une proie facile, ce qu’elle était.
Après cet épisode, il épousa Ygride comme il l’avait désiré. Il gérait un commerce en ville, et elle continuait de vendre son corps pour l’argent, pour l’aider. Il inventa une histoire pour justifier le massacre des Selkis, mais personne ne sembla vraiment le croire. Les gens prenaient garde de ne pas l’approcher de trop près, lui, le fils des fermiers mystérieusement morts qui avait épousé une catin. Le regard des autres ne l’importunait guère. Il restait obsédé par l’image de sa sœur. Il revoyait son cou d’une pâleur extrême, il imaginait le sang en couler. Il pouvait sentir sur ses lèvres cet étrange goût cuivré. Durant de nombreuses années, il se cacha pour assassiner des étrangers de passage en ville, il voulait éviter d’être jugé et tuer avant d’avoir eu l’occasion de retrouver Neïade. Il devait mettre fin à cette vie lui-même. Il n’avait pas d’autres choix. Cette image le hantait, incessamment, jour et nuit.

Presque huit ans passèrent. Aussi rapidement qu’un battement de cils. Jehan conduisit un jour Ygride à la ferme dans laquelle il avait vécu. Les corps avaient été enlevés. Le sang aussi. Cependant, une odeur nauséabonde pesait toujours sur la pièce principale.
Un premier coup de poignard dans le sein. Un hurlement. Un sourire s’esquissa sur ses lèvres sévères. Un second coup au visage. Les yeux écarquillés. Un troisième au ventre qui était resté stérile au cours des années. La bouche s’ouvrit. Ygride était partie. Ce qui ne l’empêcha nullement de continuer à meurtrir le corps de celle qui avait partagé sa couche. Il planta son poignard un nombre incertain de fois, elle était tailladée de tous les côtés. Pour compléter son œuvre, il installa une corde et pendit son épouse. Qui aurait pu deviner qu’elle avait un jour été une des femmes les plus belles et séduisantes de Tameriel ?
Il savait que Neïade reviendrait un jour. Si elle était encore en vie, elle passerait certainement le seuil de cette ferme. Il lui laissa non seulement le loisir de découvrir le sort qu’il avait infligé à celle qui avait été son épouse, mais il ajouta également une note accrochée au poignard qu’elle reconnaîtrait sans aucun doute.

Il ne pouvait décemment pas rester dans un tel endroit. Les gens ne mettraient pas longtemps avant de l’accuser et le condamner. Ils se doutaient depuis longtemps, mais maintenant le doute n’était plus permis. Jehan Selkis était un monstre. Il partit. Du jour au lendemain. Il vola un cheval, un nouveau poignard et s’en alla commencer une nouvelle vie sur les chemins sinueux qui serpentaient dans tout le royaume de Kahanor. Il devint tueur à gages, s’entraînant à traquer des hommes, des femmes, des enfants, s’appliquant à les égorger ou à les abattre d’une rapide flèche entre les deux yeux. Il n’avait pas de limite. Sa cruauté grandissait, sans qu’il ne s’en rende vraiment compte. Il ne s’agissait que d’un loisir à ses yeux. Un loisir en attendant de retrouver sa sœur et que la vraie traque commence.

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