Le tournois s'était révèle être une véritable catastrophe, et l'amusement que la royauté avait voulu suscité s'était mue en une étrange dualité au sein même de la population. Certains s'étaient montrés outrés par l'attaque directe proférée sur le jeune souverain, d'autres avaient souris en se disant que le jeune roi ainsi que sa cour n'auraient le droit qu'à un règne de courte durée. Les rumeurs étaient alors allée bon train, et même si les gens du palais royal se taisaient sur son passage, se tournant comme pour cacher leur secret les plus indicibles ou détournant les yeux comme pour éviter son regard scrutateur. Pourtant, elle se fichait bien de leurs petites manigances, elle se fichait bien de savoir si oui ou non ils étaient pour le pouvoir en place ou si ils soutenaient le roi, elle n'avait elle même pas une idée encore bien précise de son allégeance depuis que le royaume laissait ses terres en déperdition. Qui conque lui aurait apporté un minimum d'aide aurait eu accès à sa reconnaissance éternelle et peut être même son allégeance, mais alors qu'elle regardait au travers d'une grande fenêtre perdue dans un des longs couloirs du palais elle se disait que personne ne méritait sa confiance, pas plus que qui conque ne méritait ses maigres forces. Pourtant, elle comprenait la peur qu'une telle menace suscitait, elle comprenait que l'on préférait repousser l'idée plutôt que de venir l'affronter, mais cela n'en était que plus difficilement acceptable.

Des pas s'étaient mis à résonner dans le couloir, et son regard s'était alors détaché de ce ciel éternellement bleu pour se reporter sur le page qui avançait à vive allure vers elle. Essoufflé, les joues rougies par la chaleur des lieux, il avait alors bredouiller quelques mots comme quoi il était désolé de la déranger mais que Lord Aerendel l'attendait dans le parc. Il avait ajouté, comme si cela lui était revenu à l'esprit sous la forme d'une illumination, qu'il l'attendait près des rosiers ; et avant qu'elle ai pu rajouter quoi que ce soit il s'était déjà plié en deux dans une courbette plus que révérencieuse puis s'était éclipsé.

Debout dans le couloir vide, elle était restée coi tout en le regardant s'éloigner, se remémorant les événements qui avait conduit à cette invitation.  Le tournois, les couleurs qu'elle lui avait permis de porter en son nom, les regards qu'ils avaient échangé, l'attentat, et puis cette façon galante qu'il avait eu de se proposer pour la raccompagner. Ailleurs qu'ici, dans les terres australes, elle se serait permis de refuser sous prétexte qu'elle savait encore se débrouiller seule sans avoir besoin d'un quelconque chaperon puisqu'elle était maîtresse en ses terres, mais elle s'était tue et avant accepté l'invitation qu'il lui avait faite. De la même façon elle n'avait su lui refuser cette promesse de le revoir dès que l'opportunité se présenterait, et l'opportunité s'était ainsi présentée sous la forme d'un rendez-vous. A y réfléchir elle aurait peut être dû refuser, mais elle avait apprit qu'il était toujours malvenu de refuser les faveurs d'un homme surtout quand celui-ci se trouvait être aussi puissant que le seigneur d'Elaven ; nul ne pouvait ignorer qui il était, pas même l'un des bannerets des Oaken.

Un mince sourire sur les lèvres, après un instant de réflexion quant à la façon dont il fallait agir en de telles circonstances, elle se mettait enfin en mouvement jusqu'à attendre les jardins de la demeure royale. Ils n'avaient rien de commun au parc qui était attenant à la demeure des Blackwood, les plantes qui y poussaient été d'une multitudes de couleurs et tout se mariait avec élégance, là où dans le nord on se permettait surtout de planter quelques fleurs vivaces mais surtout de grands conifères qui résistaient aux basses températures ainsi qu'aux grands vents qui descendaient des hautes montagnes. Elle se perdait dans les chemins, suivant de petits sentiers, en demandant parfois son chemin à quelques pages qui semblaient attendre que le temps passe. On lui indiquait vaguement un itinéraire qu'elle suivait avec quelques difficultés, mais assurément après avoir tourné quelques fois de trop, croisant des jeunes filles qui gloussaient sur son chemin se murmurant à l'oreille des mots qu'Alceste n'auraient pas eu de mal à deviner tant elle pouvait se revoir elle et ses sœurs dans la même position.

Elle leur avait offert un sourire auquel elle n'avait pas répondu, se contentant de la regarder dédaigneusement, et il était vrai qu'à coté de ces jeunes demoiselles vêtues richement de ces voileries ainsi que de ces tissus riches en couleurs, elle faisait bien pâle figure. Mais peut lui importait de ne pas rentrer dans les standards demander en cette région, elle n'était ici qu'en tant qu'invité et ne se destinait pas à y rester. Inutile alors d'envier leurs jolies robes qui n'auraient su leur tenir chaud dans les terres hautes. Cette simple réflexion fut alors évincée de son esprit quand ses yeux croisèrent la silhouette de l'homme qui l'avait invité à le rejoindre, d'abord hésitante tant il avait l'air occupé à autre chose, elle finit par faire quelques pas jusqu'à se tenir à ses cotés.  Elle tenta de comprendre ce qu'il faisait, ou tout du moins ce qui l'absorbait ainsi dans la contemplation de l'herbe qui poussait sous leurs pieds, mais n'y voyant pas un fort grand intérêt elle se permit de rompre le silence. « C'est une bien bonne journée pour admirer la nature, et essentiellement quand on souhaite regarder l'herbe pousser à l’œil nu. », les mots s'étaient échappés de sa bouche, un peu trop vivement, sans grande réflexion de sa part, et elle s'en était presque aussitôt voulue de s'être montrée aussi désinvolte face à quelqu'un d'aussi puissant que lui. Alors comme pour rattraper le poids de ses mots, elle s'était confondue dans une courbette dont elle n'avait que trop peu l'habitude, avant d'enfin redevenir véritablement polie. « Bonjour. », et cette politesse c'était résumée en un seul mot accompagné d'un mine sourire dessiné sur ses lèvres pleines.