Sujet: Marché d'été (Pv Azylis) Sam 29 Mar - 20:41
Marché d'été
Flashback, 4 ans plus tôt.
Déjà les prémices du tumulte qui allait envahir la Cité Libre du continent tout aussi indépendant se faisait entendre dans le labyrinthe de ruelles encore baigné dans l'obscurité et la fraîcheur des nuits insulaires. Peu à peu l'astre solaire sortait de son repos mérité, donnant progressivement sa splendeur aux pierres claires composant les façades des grands monuments du lieu, irradiant les pavés et échauffant les esprits.
***
La jeune Cassandre était allongée, nue sous une mince couverture, dans la modeste chambre qu'elle occupait à la Sangsue. Après lui avoir servit de domicile, de refuge lorsque les temps devinrent difficiles, l'établissement était aussi devenu son lieu de travail, où elle officiait comme prestataire de plaisirs. Ce n'était ni une vocation, ni un choix, mais après avoir reçu une formation de la main même de la tenancière de la maison, la venimeuse Calypso Sand, il était tout naturel qu'elle prenne le flambeau en retour. Cela faisait plus d'un an que Cassandre était prostituée, statut qu'elle assumait désormais pleinement. La soirée qui précéda fut peu agréable, la fillette vit défiler dans sa couche de nombreux hommes en quête d'un instant fugace et sensuel, de compagnie et d'une oreille attentive. C'était évidement son pain quotidien, mais l’événement qui se préparait en la Cité Libre ne faisait qu'accroître la clientèle déjà fidèle et abondante des bordels.
L'aube était imminente, le fracas de masses que l'on déplace, des éclats de voix résonnaient un peu partout. Cassandre n'avait pas dormi, même épuisée, elle n'avait su trouver le sommeil, songeant au jours qui s’annonçaient. Elle était très emballée par ce que la Cité avait à offrir en ces temps de fête, et cette année, elle avait décidé de prendre son courage à deux mains et demander l'autorisation de se rendre au célèbre Marché d’Été de Yelderhil. Rêveuse, l'esprit ailleurs, Cassandre se laissa emporter dans une douce inertie, malgré l'agitation qui devenait de plus en plus présente.
***
Elle se réveilla quelques heures plus tard, fraîche comme au premier jour, probablement vivifiée par ses projets de la journée. Cependant l'ombre d'une hésitation planait, menaçant la réussite de son entreprise ; et si Calypso refusait ? C'était une possibilité, un cas de figure auquel Cassandre avait pensé, mais elle n'avait que trop longtemps ruminé l'affaire et se sentait prête à affronter la décision de sa maîtresse. C'est dans son bureau, superbement apprêtée comme à son habitude, qu'elle la trouva, affairée à trier de la paperasse, office que la fillette ne lui enviait point mais indispensable au bon fonctionnement de la Sangsue. Cassandre ne s'annonça pas en entrant dans la pièce, Calypso savait reconnaître à qui elle avait à faire sans que les mots ne viennent interrompre ses pensées.
« M...madame ... » Dit la jeune fille en prenant place sur un des confortables fauteuils, dans un souffle. Bégayant quelque peu. « Belle journée n'est ce pas ? » Un rictus indéchiffrable se dessina sur le visage de la maquerelle, Cassandre sût de suite que noyer le poisson n'était pas un moyen efficace d'arriver à ses fins, ce que Calypso semblait avoir parfaitement compris ; la pluie et le beau temps n'étaient pas les raisons de sa venue.
« Trêve de parlotte, Cassandre. Nous savons toutes deux que tu ne souhaites pas me parler de ce soleil qui rythme nos vies depuis leur débuts, sinon j'espère que tu as d'autres motivations pour venir me déranger ici . » Lança la femme tout en cachetant une lettre avec l'énorme bague qui dévorait l'index d'une de ses mains délicates. Malgré la dureté de ses paroles, Calypso n'était pas aussi sèche qu'elle n'y paraissait. Mieux, elle s'occupait de ses filles avec une affection toute particulière. Ces mots cinglants n'étaient que façade, destinés à faire sortir les vers du nez, car la patience n'était pas une vertu courante chez les femmes de sang chaud.
« ..Je...je..souhaiterais, avec votre accord, Madame, si vous l'acceptez, j'aimerais me rendre à l'ouverture du Marché d'Eté aujourd'hui..Je rêve d'y aller depuis toute petite, l'animation, les bruits que j'entends, les musiques entêtantes, les odeurs, les couleurs.... »
L'expression se changea en sourire amusé sur les lèvres de Calypso, nulle besoin d'autre réponse pour Cassandre, elle savait aussi quand sa patronne approuvait une idée. Quelle monstre aurait-elle été de briser en morceaux le rêve innocent d'une jeune fille à qui on avait interdit de l'être ?
« Effectivement, je comptais m'y rendre aussi, il en va de la notoriété de la Sangsue que je sois ainsi présente à cet événement même si ces mondanités me rebutent … J'ai aussi besoin de réapprovisionner nos réserves de vins qui se sont bien trop vite écoulées. Peut-être pourrais-tu faire du repérage pour moi ces premiers jours ? Un peu de changement ne nous fera pas de mal, Cassandre. »
Dernière édition par Cassandre le Mar 1 Avr - 15:35, édité 1 fois
Invité
Sujet: Re: Marché d'été (Pv Azylis) Dim 30 Mar - 19:36
Comme un soupçon de déjà-vu
Des cris, des ordres, des pas de courses retentissent dans la ville. Sous la chaleur ardente du soleil levant de la Cité Libre, le peuple s’active. Que se passe-t-il ? Le célèbre et tant attendu marché d’été d’Yelderhil arrive enfin. C’est un évènement de grande ampleur, que chaque habitant de la cité attend avec une impatience certaine. L’argent qu’il peut ramener, ce souffle de nouveau, d’inattendu met en émoi la ville entière. Le marché regroupe environ toutes sortes de marchandises, de l’esclave aux fruits rares, en passant par des babioles et des armes de fer forgé. Et surtout, il y a le vin. Ce liquide tant apprécié des hommes n’est pas spécialement rare, mais c’est souvent de la piquette qui se trouve dans les différents commerces. Or Jansen aime le bon vin. Cette espèce d’ivrogne adore le marché d’été car c’est à ce moment de l’année qu’il trouve ses meilleurs crus.
La place centrale, fourmillante de vie commence à se remplir gentiment de différents étalages. Les stands se montent, prennent forme selon les goûts des marchands. Les tonnelles qui sont installées au-dessus des étalages créent comme un rideau d’ombre, protégeant ainsi les habitants des rayons du soleil. Ce matin, Azylis est attitrée au ménage de l’immense demeure de Jansen. A genoux sur le sol, elle nettoie avec attention le carrelage à l’aide d’une serpillière. Le vaniteux vient alors à elle. « Je veux que tu viennes avec moi au marché. J’ai besoin de me montrer en bonne compagnie, or tu es la moins laide et la moins abîmée de mes esclaves. Va te laver et t’habiller convenablement. » La jeune femme ne dédaigne lever le regard vers son maître. Elle se contente de reposer la serpillière dans le seau à son côté, se lève et se dirige vers ce qui pourrait être appelé une salle d’eau. A l’aide d’une éponge et d’une bassine, elle se fait la toilette. Ce petit moment de réconfort apaise la jeune femme constamment sous tension. Une fois propre, elle enfile une tenue courante dans Yelderhil, dévoilant ses épaules frêles, son dos nu et ses jambes fines et allongées. La jeune fille se présenta quelques minutes plus tard à son maître. Au rictus malsain qui se dessinait sur le visage du tortionnaire, elle comprit qu’elle lui plaisait ainsi vêtue. « Parfait petite. Nous pouvons y aller. » Il passa ses doigts pervers dans la chevelure de jais d’Azylis qui eut un frisson de dégout. Accompagné de deux esclaves qui lui servaient de garde du corps ainsi que de la jeune femme, Jansen sorti de son trou avec la ferme intention de trouver les meilleurs crus de l’année. La jeune esclave se faisait la plus discrète possible, se cachant derrière sa longue crinière charbon. Mais intérieurement elle était plus que ravi et regardait tout autour d'elle. Des étoiles brillaient dans ses yeux tant la joie de cette jeune enfant était palpable. Depuis le meurtre de sa grande soeur sous ses yeux elle n'était plus sortie de la maison de son maître. Le contact du soleil chaud sur sa peau lui donnait des frissons de bonheur. Les grains de sable sous ses pieds légèrement chaussés la chatouillaient. Cette journée allait sûrement entrer dans son top-ten des journées les moins pourries de son existence ...
Les yeux brillants d'émotion, la tête dans les étoiles, flottante, tout simplement heureuse, Cassandre quitta Calypso et se précipita dans sa chambre. Les autres pensionnaires de la Sangsue étaient toutes debout tandis que le soleil arrivait à son zénith, et se préparaient consciencieusement. La jeune fille se doutait bien qu'elle possédait un privilège, et fit donc de son mieux pour dissimuler son allégresse qui aurait pu paraître malvenue. Par chance, les filles étaient bien trop occupées pour n'avoir cure des joies, comme des peines, de la petite. A vrai dire, à part la maquerelle, personne ne s'inquiétait vraiment de son quotidien. Pour une fois cela ne dérangeait pas Cassandre, qui n'avait pas envie de partager son bonheur. C'était quelque chose qui n'appartenait qu'à elle, l'incarnation de son rêve, une aventure, un périple qu'elle souhaitait entamer seule. Elle croisa sa mère, qui ne remarqua même pas sa présence. Il lui restait encore quelques heures, avant de pouvoir quitter l'établissement et assister au firmament de l’événement. Frétillante, impatiente, Cassandre entreprit de continuer les travaux de couture d'une robe qu'elle avait imaginée spécialement pour cette sortie à ses yeux exceptionnelle. Ses instruments et les bouts de tissus épars virevoltèrent bientôt entre ses doigts minutieux et, concentrée dans son ouvrage, elle laissa son esprit se détendre quelque peu.
***
C'est Calypso elle même qui vint la sortir de cet instant de répit. Passionnée par sa besogne, c'est au moment elle donnait le dernier coup d'aiguille que la porte s'ouvrit sur la femme qui, en ricanant délicieusement, lui demanda si elle comptait oui ou non s'occuper de sa demande. Dehors le boucan des festivaliers rompait à tout rompre le calme de la petite chambre. Le temps d'enfiler sa création toute de lin brun brodée, et Cassandre était prête. Calypso lui donna quelques indications et lui emboîta le pas en sortant de la Sangsue.
La chaleur était écrasante, étouffante. L'ombre n'était que trop rare et la légèreté de la tenue de la jeune fille lui permettait, à son grand plaisir, le moindre petit souffle d'air frais. Les deux femmes marchèrent un certain moment ensemble, silencieusement, dans un vacarme d'enfer. Une fanfare, des rythme tribaux de percussions et des chants dans des langues d'ailleurs raisonnaient à travers toute la cité. De succulents fumets s'élevaient d'étalages où l'on cuisait d'appétissantes viandes exotiques, les gens parlaient, fort, buvaient, beaucoup, chahutaient, négociaient... Calypso quitta Cassandre lorsque celles-ci atteignirent une des grand place, bondée. Enfin livrée à elle même, elle pourrait enfin savourer, goûter à pleine bouche, sentir, toucher du doigt, tout ce que ce rêve éveillé lui présentait. Sa curiosité d'enfant l'emporta quand elle se mit à écouter, malgré elle, les conversations des badauds. Que tout ce monde était intéressant ! Euphorique, elle salua les dames qu'elle rencontra sur son chemin, appliquant les politesses qu'on lui avait inculqué. La bonne humeur ambiante était contagieuse, trottinant avec grâce parmi les tentes et présentoirs, Cassandre arriva près des docks où se trouvait la zone du marché destinée au troc d'esclaves.
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